
Physarum polycephalum dans son habitat naturel Source : http://sweetrandomscience.blogspot.com/2014/01/le-metro-de-tokyo-et-les-routes-des.html
A chaque grève des transports, à chaque catastrophe naturelle on se rend compte de l’importance des réseaux de transports. Les acteurs en charge de la mobilité, tentent en permanence d’améliorer la structure du réseau et d’anticiper tous les accidents pouvant entraver le trafic. Cela demande d’étudier et d’analyser de nombreuses couches de données et le risque et de se perde au milieu de toutes ces informations. Alors, pourquoi ne pas demander de l’aide à un petit être unicellulaire, sans cerveau ni neurones ? Aussi étonnant que cela puisse paraître c’est ce qu’à décider de faire une équipe anglo-japonaise de chercheurs en 2010 en confiant au Blob la responsabilité d’améliorer le réseau ferroviaire de Tokyo.
The Shortest Path pour sortir d’un labyrinthe, sans cerveau le Blob y parvient
Le Blob de son nom scientifique Physarum polycephalum est un myxomycète vivant de couleur jaune qui se nourrit principalement de spores de champignons, de bactéries ou de microbes. Cet être vivant est un objet de fascination pour les scientifiques car même sans cerveau ni neurone il est capable de trouver le chemin optimal vers la nourriture, et cela même dans des situations complexes.

Physarum dans un labyrinthe. Crédits : T. Nakagaki, H. Yamada and A. T´oth Source :http://sweetrandomscience.blogspot.com/2014/01/le-metro-de-tokyo-et-les-routes-des.html
En 2008, le professeur Nakagaki Toshiyuki remporte le prix Ig Nobel en prouvant qu’un Blob enfermé dans un labyrinthe peut trouver le chemin le plus court vers la sortie. Le Physarum polycephalum se déplace en créant une structure tubulaire comparable à notre système de vaisseaux sanguins et cherche sa nourriture en modulant la taille de cette structure. En réalité, le Blob ne va pas directement de l’entrée à la sortie du labyrinthe, il le recouvre entièrement et au contact des aliments décide de conserver uniquement les tubes qui lui permettent de se nourrir le plus rapidement et le plus efficacement possible.
En une nuit le Blob trouve the Best Path pour relier 37 villes japonaises
Manger en dépensant le moins d’énergie possible semble être la devise du Blob et les chercheurs multiplient les expériences pour montrer son efficacité à se nourrir sans trop d’effort. Nakagaki Toshiyuki après avoir montré que le Blob arrive à trouver The Shortest Path vers la sortie du labyrinthe intègre en 2010 une nouvelle équipe de chercheurs japonais et britanniques pour montrer que cet être sans cerveau peut également trouver the Best Path.

(B) Extension du Blob avec contraintes lumineuses pour reproduire les contraintes de terrain (C) Réseau produit par le Blob (D) Actuel réseau de Tokyo Source :http://sweetrandomscience.blogspot.com/2014/01/le-metro-de-tokyo-et-les-routes-des.html
Dans une boîte de pétri, 37 flocons d’avoine sont répartis afin d’imiter la position des villes nippones. Le Blob est alors déposé sur la ville principale de la région, à savoir Tokyo et, on lui laisse une journée pour s’étendre et choisir les meilleurs itinéraires pour rejoindre les villes alentours. Pour modéliser les contraintes de terrain et mettre le Blob dans des conditions réalistes, de la lumière est utilisée. En effet, cet être se développe plus facilement dans l’obscurité ainsi, les reliefs bas sont représentés par des zones d’ombres. Un peu plus de 24h plus tard, le Blob a reproduit de manière quasi identique le réseau ferroviaire de Tokyo ( sans prendre en compte les liaisons inter-villes les plus éloignés).
Le Physarum Algorithme, une future extension pour nos logiciels de SIG ?
Remplacer le traitement de longs algorithmes par une simple cartographie du réseau produit par le Blob? C’est tentant mais pas encore à l’ordre du jour. Cependant, cet être vivant unicellulaire a permis Sun de créer des algorithmes inspirés de la stratégie du Blob, Physarum-inspired Algorithm (Yahui, 2017). Ces Blobs virtuels permettent l’optimisation des réseaux de communication existante en reprenant la logique de fonctionnement tubulaire du Blob.
Ce type d’algorithme a été utilisé par, deux chercheurs de l’Université de Bristol, Andy Adamatsky et Jeff Jones afin de reproduire le réseau routier de l’Angleterre. Mais cette foi-ci avec l’intention d’utiliser les déplacements du Blob pour construire des scénarios de reconfiguration du système routier en cas de catastrophe naturelle ou d’accident important.
Pour conclure
Alors, on ne va pas encore laisser le soin au Blob de redessiner toutes nos cartes mais on peut lui faire confiance pour nous aider à améliorer nos algorithmes de type The Best Path ou The Shortest Path et nous donner des pistes de réflexion pour reconfigurer rapidement un réseau en cas de crise.
Bibliographie
HERZBERG Nathaniel (2017) « Quand le « blob » se développe selon le réseau ferré de Tokyo » Le Monde [En Ligne] https://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/06/19/quant-le-blob-se-developpe-selon-le-reseau-ferre-de-tokyo_5147467_1650684.html
MADIER Karim (2014) « Le métro de Tokyo et les routes des états-unis modélisés par un micro organisme » Sweet Random Science [En Ligne] http://sweetrandomscience.blogspot.com/2014/01/le-metro-de-tokyo-et-les-routes-des.html
SUN Yahui (2017) « Physarum-inspired Network Optimization : A review » [En Ligne] https://www.researchgate.net/publication/321719515_Physarum-inspired_Network_Optimization_A_Review
TERO Atsushi et al. (2010) « Rules for biologically inspired adaptive network design » Science [En Ligne] http://www.uvm.edu/pdodds/files/papers/others/2010/tero2010a.pdf