Les forêts denses humides d’Afrique Centrale : un ensemble dense mais peu étudié
Les forêts denses humides d’Afrique Centrale font partie des forêts les moins connues de la terre malgré le fait qu’elles sont considérées comme le plus grand massif forestier tropical au monde après l’Amazonie. Les dispositifs scientifiques existants d’inventaires et de suivi dynamiques ne recouvrent que quelques centaines d’hectares sur plusieurs millions de la région, ce qui de fait empêche une approche globale de la diversité et du fonctionnement systémique de ces forêts. Par ces dispositifs scientifiques, les arbres constituant la forêt sont mesurés, identifiés et suivis dans le temps.
Les concessions forestières : un moyen d’inventorier ces espaces forestiers
À l’inverse des inventaires forestiers qui sont peu nombreux, les inventaires d’aménagement effectués dans le cadre des concessions forestières sont bien existant et ce, depuis les changements de politiques forestières en 1992. Les compagnies forestières ont donc l’obligation de créer des plans d’aménagement dans les concessions qu’elles possèdent et exploitent.
En 2019, il a été estimé dans cette région que sur 50 millions d’hectares de forêts possédées par les exploitants, 58% étaient inventoriés. Ceci constitue une source importante de données mais qui n’est pas exploitée par la communauté scientifique car les protocoles que les exploitants ont mis en place pour la récolte des données ne sont pas conformes aux standards scientifiques.
Le CIRAD (Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement) travaille depuis plus de vingt ans avec différents bureaux d’études et des dizaines de compagnies forestières en Afrique Centrale. Ces différents partenariats ont permis au CIRAD de concevoir une base de données régionale d’inventaires et d’aménagement appelée CoFor (Congo Basin Forest). Cette base contient des données récoltées sur plus de 100 000 ha d’inventaire, l’équivalent d’environ 12 millions d’arbres répertoriés cinq pays.
Conception de la base Cofor-AGB
À partir de ces données, le CIRAD en association avec l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) a créé une seconde base de données Cofor-AGB. AGB renvoie à l’expression anglaise « aboveground biomass » soit « biomasse aérienne » (renvoyant à la biomasse des parties ligneuses soit le tronc, l’écorce, les branches et brindilles) de tous les arbres (excluant donc les souches et racines). La base de données Cofor-AGB contient donc des estimations de la biomasse pour plus de 100,000 ha de forêts inventoriées pour les années 2000 et 2010 dans cinq pays d’Afrique Central, il s’agit donc de la première base de données qui permet d’avoir une vue à grande échelle sur les variations spatiales des biomasses aériennes dans les forêts d’Afrique Centrale.
Répartition estimation de la biomasse aérienne agrégée à 5km par pixel. Les frontières des pays sont représentées par les lignes noires et la distribution spatiale des forêts humides sont représentées en gris.
Source de l’image : Ploton, P., Mortier, F., Barbier, N. et al. A map of African humid tropical forest aboveground biomass derived from management inventories. Sci Data 7, 221 (2020)
Cofor-AGB est donc une source de données qui peut être mise à disposition d’autres études et analyses : la quantification de la biomasse aérienne est étudiée pour des fins à la fois commerciales (bois d’œuvre, fibre, production énergétique) et scientifiques (recherches sur le fonctionnement et la productivité des écosystèmes forestiers par exemple). La biomasse aérienne est également un élément important dans la compréhension et l’analyse du système climatique et le cycle du carbone.
Le jeu de données CoforADB : https://springernature.figshare.com/articles/Metadata_record_for_A_map_of_African_humid_tropical_forest_aboveground_biomass_derived_from_management_inventories/12504911
Sources :
https://www.observatoire-comifac.net/monitoring_system/concessions
https://agritrop.cirad.fr/596438/1/Ploton%26al%282020%29BiomassEstimationInCentralAfricanForests.pdf