
Amy Andriamasomanana
En cette 33ème édition du Festival International de Géographie de Saint-Dié-des-Vosges le thème à l’honneur était les déserts.
A cette occasion, le chercheur cartographe Matthieu Noucher a abordé lors de sa conférence le thème du désert des données. Ce terme désigne les espaces géographiques peu ou pas cartographiés.
Nous pouvons alors nous poser la question de ce que le manque d’informations géographiques nous dit sur les enjeux de pouvoir entre les pays.
Avec la révolution des nouvelles technologies, on a tendance à penser que chaque partie, même infime, du globe est cartographiée. Cependant la réalité en est toute autre.
Monsieur Noucher a pris notamment l’exemple de la représentation des données concernant la biodiversité. Ces données sont fournies en open data par le réseau GBIF (Global Biodiversity Information Facility).
Malgré l’abondance de ces données, soit près de 1,8 milliard de données sur la biodiversité dans le monde, elles n’en restent pas moins distribuées de manière hétérogène.
Nous retrouvons des zones avec beaucoup de données ce que l’on nomme les hotspots, et d’autres espaces sans données appelés les cold spots, ces données sont aussi influencées par les pays partenaires du réseau qui décident des zones à privilégier dans la récolte et la représentation de l’information géographique.

Carte des pays votants – source : gbif.org
Les pays votants vont privilégier leur propre intérêt et cela va se refléter sur la cartographie des données et l’apparition de zones blanches de données.
Les zones avec beaucoup de données seront en général les zones représentant un intérêt pour les pays en question : intérêt économique, touristique.
A l’échelle mondiale, 10% des données (sur la biodiversité) concernent la ceinture intertropicale, 75% des données concernent les territoires situés au nord du tropique du Cancer. Ce qui est réellement paradoxal puisque la biodiversité est davantage riche et fragile dans ces territoires peu étudiés.
Matthieu Noucher prend l’exemple de la Guyane, qui est l’un des territoires où il a basé son étude. Il explique que sur le territoire guyanais, les hotspots sont les grandes villes, ou encore les littoraux, et d’autres espaces sont beaucoup moins riches en données. Cela aura un impact sur la précision et la véracité des analyses territoriales. Certains quartiers que Matthieu Noucher qualifie “d’habitats spontanés” ne sont pas représentés sur les cartes alors que ces quartiers sont les plus dynamiques sur le plan démographique.